Le brainstorming ou remue-méninges

Brainstorming : c’est quoi ? à quoi ça sert ?
Alexander (Alex) Osborn, président de l’agence de publicité BBDO (Batten, Burton, Durstine & Osborn) invente en 1935 une technique d’animation de réunion qui, grâce à des règles très simples, empêche les participants de faire des objections continuelles aux suggestions émises par les autres. La principale règle n’est à cette époque pas formulée : il s’agit d’imposer au nom de la quantité un rythme qui empêchera de fait les participants de formuler des objections. Les participants appellent ces réunions des « brainstorm sessions », d’où le mot « brainstorming ». Par ce simple artifice, une des plaies les plus pénibles des réunions professionnelles (les gens qui critiquent, ceux qui se moquent, ceux qui dénigrant, …) s’en trouve effacée.
Le brainstorming (ou « remue-méninges » en français) est donc une façon de trouver rapidement des idées en groupe, par exemple pour choisir un problème à étudier, pour imaginer les causes possibles d’un problème ou pour inventer des solutions. Rappelons qu’il ne s’agit pas d’une « tempête de cerveau » comme une mauvaise traduction voudrait nous le faire croire, mais bel et bien de « prendre d’assaut un problème, grâce à ses méninges » (to storm en anglais veut dire « prendre d’assaut » comme dans l’expression « the storming of the Bastille » par exemple).
- Dans cet article
- Brainstorming : c'est quoi ? à quoi ça sert ?
- Le brainstorming, comment ça marche concrètement ?
- Bon, est-ce que ça marche en vrai ?
- Ressources sur le brainstorming

Le brainstorming, comment ça marche concrètement ?
Une séance de brainstorming ne s’improvise pas. Vous devrez préparer longtemps à l’avance chacune des parties de votre session de créativité et, pour qu’elle soit efficace, elle devra être composée d’une phase dite « divergente » (pendant laquelle les idées créatives sont exprimées) et d’une phase « convergente » qui est le moment où les idées produits sont classées, adaptées, regroupées, écartées, rationalisées, etc en fonction des objectifs de la session.
Première partie : la production d’idées, la phase divergente
Cela pourrait parait à première vue évident mais la première chose à faire est d’être très clair sur l’objectif de la séance de créativité. Il n’est pas rare que les participants ne viennent pas tous exactement pour la même chose ou même que plusieurs objectifs soient poursuivis à la fois.
Il faut donc préciser l’objet de la séance de créativité et tout les participants doivent le connaître. A quelle question veut-on répondre ? Quel est le problème que nous volons résoudre ? …
Exemples :
- comment organiser la diffusion des informations sur la qualité ?
- pour quelles raisons nos correspondants ont-ils du mal à nous joindre ?
- quel pourrait être le nouveau nom de notre gamme de produits ?
Il est également nécessaire de rappeler (et d’insister sur !) les règles du brainstorming, afin que tout le monde se les approprie. Il faudra vraisemblablement que l’animateur les rappelle à plusieurs reprises pendant la séance. Le centre Héracles (Belgique) propose un moyen mnémotechnique simple pour se souvenir de ces cinq règles : D.R.E.A.M.
- Délire : produire des idées folles, farfelues, …
- Respect : interdire de critiquer les idées des autres ou les siennes (que ce soit en positif ou en négatif)
- Écrire : noter toutes les idées qui sont émises (même par ceux qui parlent moins fort que les autres)
- Associer : enchainer mes idées avec celles des autres, ne pas hésiter à rebondir, à s’inspirer
- Maximum : il nous faut un maximum d’idées (300 idées en 45 minutes à 10 personnes est un but atteignable pour une bonne séance de créativité)
Seconde partie : l’exploitation des idées, la phase convergente
Il s’agit d’une phase essentielle : il faut trier les idées, les apprécier, choisir celles que l’on veut développer. Comme cela peut être assez fastidieux, cette étape est parfois bâclée ou renvoyée aux calendes grecques. C’est une erreur. Une bonne séance de créativité dépend autant de cette phase de convergence que de l’étape précédente de production des idées.
Diverses méthodes existent pour trier ces idées. Après avoir terminé la production des idées avec le groupe, il faut les regrouper par thème, les lister selon les critères ou les organiser par catégorie. On peut aussi faire une liste des idées utiles immédiatement, une autre pour celles qui doivent être améliorées et une dernière pour les idées réellement nouvelles.
Cette étape doit être conduite de façon méthodique. C’est le moment où le « soufflé retombe », là où l’excitation diminue après la phase de « délire ». Les participants peuvent alors parfois se démotiver un peu et, si c’est le cas, il n’est peut-être pas inutile de faire une petite pause, afin d’offrir à chacun une respiration bienvenue. Une fois les idées rassemblées par thèmes communs et les redondances supprimées, chacune d’elle fait l’objet d’une « évaluation » sur la base d’une grille / matrice qui sera expliquée aux participants.
Les critères d’évaluation dépendent bien sur du sujet concerné (faisabilité, impact, rapidité de mise en œuvre, …). Il s’agit d’un travail de positionnement des idées les unes par rapport aux autres, aussi est-il important de choisir des critères simples, sur l’interprétation desquels les participants n’auront pas de désaccord et qui permettront de passer rapidement en revue toutes les idées émises.
Pour profiter réellement des avantages du brainstorming, il faut améliorer les idées trouvées en phase de « délire ». Il faut donc les reformuler, les combiner ensemble, les « concasser ». C’est en investissant du temps dans l’amélioration des idées que l’on peut espérer de nouvelles alternatives. En utilisant des techniques de créativité diversifiées, on provoque davantage l’imagination. Stimuler l’imagination ouvre la porte à de nouvelles suggestions qui peuvent aboutir à de meilleures solutions et à plus d’innovation. En donnant suffisamment de temps et de l’espace à la pensée créative, on favorise l’innovation.
Pour animer cette phase, il faut donc bien maîtriser les techniques de créativité afin de ne pas se laisser entrainer sur des pistes inutiles ou chronophages et de savoir rebondir lorsque le groupe « coince ».
Bon, est-ce que ça marche en vrai ?
Pas vraiment en fait …
D’après ses défenseurs, l’utilisation de cette technique a l’avantage de stimuler la créativité et d’encourager les attitudes positives en incitant chacun à accepter la libre expression d’autrui. Il peut être utilisé aux différentes phases de la démarche d’étude de problème. Mais attention, on pratique souvent des remue-méninges sous une forme dégradée qui se réduit à une pauvre énumération. Il faut prendre le temps de réaliser une véritable séance de créativité (trente minutes, plusieurs heures dans l’idéal) en créant un climat très détendu et stimulant.
D’un point de vue plus fondamental de nombreux chercheurs et auteurs réfutent l’efficacité même du brainstorming :
- en ce qui concerne le principe même du brainstorming : certaines recherches montrent que le fait de produire le maximum d’idées et de ne les évaluer qu’après conduit à des idées de moins bonnes qualités que lorsque les participants ont connaissance des critères d’évaluation avant la phase d’idéation et les auto-évaluent
- certaines recherches suggèrent que les séances de brainstorming sont inutiles car les gens ont tendance à refléter les pensées des autres (Fiona Macrae, Daily Mail)
- le brainstorming est imbattable pour le nombre global d’idées émises. Des études montrent qu’il en va tout autrement si on s’intéresse aux « bonnes idées »
- le champ où le brainstorming appairait le plus efficace est restreint : recherche d’idées publicitaires, slogans, base-line, etc. (Alex Osborn était un publicitaire)
- impossibilité de trier les idées dans des délais utiles (cf. l’exemple des 6 mois nécessaires au dépouillement des 12 000 idées du brainstorming géant organisé par Edward de Bono pour trouver des solutions à des émeutes interraciales récurrentes en Afrique du Sud)
- la mise en œuvre des idées produite est une étape qui, malheureusement, n’appairait pas cruciale dans la méthode
Le brainstorming aurait même des effets pernicieux voire néfastes à long terme :
- une conception épisodique de la créativité (on n’est créatif qu’une fois par an, lors des brainstorming annuels, le reste du temps, on agit de façon répétitive, …)
- l’idée que la créativité, c’est « pouvoir dire n’importe quoi »
- le renforcement d’une certitude : les idées exprimées ne sont pas appliquées (« on nous fait parler pour rien »)
De fait, le brainstorming est souvent utilisé comme un « heart storming » qui correspond au chapeau rouge d’Edward de Bono. En bref, les critiques se concentrent sur cette évidence « crier ‘caca-boudin‘ n’est pas une idée ! ».
On peut aussi ajouter à tout ça, l’effet Ringelmann, très bien décrit dans cet article : http://www.virtuose-marketing.com/groupe-brainstorming-paresse-sociale/. Il s’agit du risque de « paresse sociale » ou du « passager clandestin » : quand on est invité à participer à un travail collectif, on peut être tenté de se reposer sur les autres et donc de ne pas donner tous les efforts qu’on donnerait si on était seul.
Un peu quand même ?
Pour améliorer un brainstorming « classique », il faut ménager des temps de réflexion individuelle que ce soit pendant la séance ou même avant la réunion. Surtout, il faut passer par l’écrit pour que chaque participant exprime ses idées. Quel que soit le support (post-it, feuilles de papier, mobiles), cela permet à tous de participer sur un pied d’égalité et de produire des idées souvent plus « qualitatives ». Tout le monde ne peut pas parler en même temps, mais tout le monde peut écrire en même temps. Certains préfèrent d’ailleurs parler de « brainwriting » plutôt que de brainstorming.
D’après David Kelley (voir aussi cet article), dirigeant d’IDEO, un brainstorming sera raté à coup sûr si :
- l’organisateur y participe
- chacun doit parler à son tour
- les idées ne viennent que des experts
- le brainstorming se déroule hors de l’entreprise
- des objectifs précis sont assignés au brainstorming
- un compte rendu détaillé va être réalisé
Pour qu’un brainstorming fonctionne à peu près, il faut :
- Définir précisément le problème consommateur à résoudre
- Écrire les règles du jeu
- la critique est pour plus tard,
- une seule personne parle à la fois
- cherchez la quantité, la production d’idées
- être visuel
- encourager les idées farfelues
- numéroter les idées
- chercher la fluidité, l’amélioration des idées, et la flexibilité, l’imagination d’idées totalement différentes
- noter les idées sur les murs : paperboard, Post-It, etc.
- préparer le brainstorming : documentation, visite, benchmark, etc.
- être le plus concret possible, être en capacité de mettre en œuvre certaines des idées émises
Ressources sur le brainstorming
Quelles techniques pour un groupe primo-créatif ?
- Il est parfois difficile pour un groupe « primo-créatif » de se laisser aller. Avez-vous des techniques, des pratiques, des outils qui permettent de résoudre ce problème ? N’hésitez pas à partager vos idées sur notre forum.
- Ce sujet contient 2 réponses, 2 participants et a été mis à jour pour la dernière fois par , le il y a 7 années et 7 mois.
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Ouvrages
- Résolution de problème : les outils (format pdf – 628.6 ko – 07/04/2006) Points de repère n° 18, METL, janvier 2001
- http://www.creativite.net/brainstorming-remue-meninges-techniques/definition-du-brainstorming/
- http://www.intelligence-creative.com/410_brainstorming_histoire.html
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Cher propriétaire du site Les Cahiers de l’Innovation,
Je tiens à vous exprimer à quel point j’apprécie votre article sur le brainstorming. Vos conseils et démarches sont incroyablement utiles et inspirent la créativité dans notre environnement de travail. J’ai trouvé vos suggestions particulièrement intéressantes et j’ai hâte de les mettre en pratique avec mon équipe. Votre contenu de qualité et votre approche pratique font de votre site une ressource inestimable pour tous ceux qui souhaitent stimuler leur potentiel créatif. Merci pour votre excellent travail !
Cordialement,
Arthur
alors ça c’est sympa, merci beaucoup !
Si ce que j’écris est utile aux lecteurs, j’en suis ravi, je fais ça pour ça.
Bonne poursuite sur les Cahiers de l’Innovation.
Bjr, un outil plus récent et bien pratique/original pour les brainstorming : le livre-box « décuplez vos idées de folie » : https://amzn.to/3Bu8VQ0
Merci Clara,
oui c’est un livre que j’ai dans ma bibliothèque 🙂
Voir aussi ce lien : 25 raisons qui font échouer les séances de brainstorming dans vos entreprises !
http://www.ideachampions.com/weblogs/archives/2016/12/post_12.shtml