Et si la blockchain permettait de réinventer la relation client ?

Après un article récent sur les liens entre la blockchain et l’Open Innovation, il est temps de voir comment cette nouvelle technologie peut également impacter un domaine qui semblait à l’abri de la disruption : la Relation Client. La Relation Client peut s’analyser comme une zone où se développent des antagonismes – déclarés ou larvés – entre les entreprises et les consommateurs. En effet, au-delà des discours quelque peu lénifiants sur les nécessaires relations de confiance et de transparence qui doivent caractériser la Relation Client, la captation et le partage de la valeur représentent un enjeu économique fondamental. Et cet enjeu génère une rivalité grandissante entre les entreprises et leurs clients.

Pourquoi la relation client est impactée par la blockchain ?

La bataille ne fait que s’accentuer sous la pression conjuguée de :

  • Une concurrence accrue entre entreprises : celle-ci rend les consommateurs de plus en plus exigeants et versatiles, érigeant le zapping entre marques comme pratique courante.
  • L’irruption de la consommation collaborative : elle est favorisée par de nouvelles plateformes web d’intermédiation qui viennent « disrupter » de nombreux secteurs et perturber l’entre soi entre consommateurs et marques établies.

Voir cet article : uberisation : le profit uber alles ?

Parallèlement, l’essor rapide des nouvelles technologies joue un rôle essentiel pour provoquer, accompagner et même accélérer les mutations de la Relation Client. Réseaux sociaux, dispositifs et environnements interactifs, explosion du m-commerce, apps spécialisées, etc. : grâce à ces innovations les clients peuvent beaucoup plus facilement et rapidement comparer les offres, exprimer leurs préférences, avis, souhaits, critiques… et ont ainsi un levier accru face aux entreprises. Pour repousser ces offensives, les marques doivent trouver des parades leur permettant de garder le contrôle sur les consommateurs. Une des pistes privilégiée est de mobiliser elles aussi les technologies afin de mieux cerner leurs clients. Une voie d’investigation majeure pour le marketing est notamment de se tourner vers les sciences cognitives et les data-sciences car la connaissance fine et intime des consommateurs parait être la voie de salut pour les entreprises. C’est là qu’entre en scène la blockchain.

Sur le thème des applications et de leur conception, voir cet article : Applications en ligne. Comment concevoir avec les utilisateurs ?

La blockchain est-elle la technologie de la disruption ?
La blockchain est-elle la technologie de la disruption ?

Ce que permet la blockchain

Récapitulons ce que permet cette technologie. Il faut voir celle-ci comme une vaste base de données distribuée où les échanges entre pairs émanent des individus eux-mêmes. Ce système décentralisé présente de nombreux avantages : traçabilité et sécurisation des transactions, authenticité, transparence, confidentialité, vitesse, ouverture, équité. Grâce à ces atouts, la blockchain suscite davantage de confiance dans les échanges de toute nature, et notamment dans les transactions commerciales. Si on transpose ces caractéristiques au domaine de la Relation Client, on se rend rapidement compte des menaces que la blockchain peut représenter pour les entreprises. Déjà des pans entiers de l’économie sont touchés. Cela a commencé par le secteur financier, là où la blockchain est née comme technologie de soubassement aux bitcoins. Mais très rapidement d’autres secteurs sont impactés : les assurances, la musique, le divertissement, et tous les domaines relevant de l’économie collaborative. Par exemple le projet Arcade City a pour ambition d’ « ubériser Uber » dans le domaine du covoiturage grâce à la blockchain. La conséquence la plus extrême va donc jusqu’à la remise en cause même du rôle des entreprises et plateformes comme intermédiaires incontournables.

Cela a commencé par le secteur financier mais très rapidement d’autres secteurs sont impactésMais le pire n’étant jamais le plus certain, ce que certains perçoivent comme une bataille impitoyable pourrait en fait se conclure par une paix armée entre entreprises et « blockchaineurs ». Plusieurs possibilités de convergence existent en vue d’une réconciliation. Les entreprises peuvent ainsi choisir de pactiser et même de collaborer avec les acteurs de la blockchain en adoptant leurs techniques : une piste consiste à recourir à des algorithmes intelligents (smart contracts) pour automatiser le déroulement de certaines transactions et faire en sorte que celles-ci soient plus performantes (par exemple dans le domaine des objets connectés) ou encore en créant une blockchain privée à usage de leurs clients. Ainsi elles récupéreraient cette technologie pour mieux servir les consommateurs.

La blockchain et les données personnelles

Une autre piste prometteuse à explorer est certainement celle des rapports entre blockchain et gestion des données personnelles, qui sont au cœur de la Relation Client et probablement le champ de bataille majeur. D’un côté, on l’a vu, les entreprises veulent s’approprier et exploiter au maximum les données personnelles de leurs clients pour mieux les cibler en leur proposant des offres individualisées. Inversement, les clients prennent conscience de la valeur de ces données et veulent les garder de la convoitise des entreprises. En cela ils sont d’ailleurs aidés par un contexte réglementaire et législatif en matière de défense des consommateurs qui est de plus en plus protecteur. Des directives européennes sont précisément à l’étude. Citons notamment les directives européennes en cours visant à renforcer le droit à l’oubli et la réappropriation par les citoyens de leurs données personnelles.

A titre d’exemple, mentionnons l’initiative d’un des acteurs en pointe du secteur français de la blockchain, la startup Ledgys, qui innove en matière de réappropriation des données en inaugurant une approche « take control of your data ». Sa solution LDN (Ledgys Data Nodes) vise ainsi à répondre à ces problématiques en faisant des consommateurs des « datasellers » : leurs données personnelles sont stockées dans des entrepôts de données de façon sécurisées grâce à l’encryptage que permet la blockchain. Les consommateurs sont ainsi en capacité de les contrôler et de les négocier en octroyant des droits d’accès à qui ils veulent.

On le voit la Relation Client reste un domaine d’avenir qui ne demande qu’à se réinventer. Et la blockchain pourrait être la solution pour cela !

Pour en savoir plus

  • OneCub, une startup des Hauts-de-France qui a mis au cœur de son business model la réappropriation par leurs clients de leurs données personnelles

[asa_collection book]blockchain[/asa_collection]

 

Chronique initialement parue sur Interactions Digitales.

Laissez un commentaire