L’impression condamnée par l’innovation numérique ?

Comme souvent avec l’innovation, la réalité défie les prédictions les plus péremptoires. Il y a 20 ans encore, avec la diffusion d’internet dans notre quotidien et les premières disparitions de magazines papier, beaucoup prédisaient alors la mort à court terme du secteur de l’impression. L’apparition des tablettes et la généralisation des smartphones a renforcé la certitude : le print allait disparaître. Après des années difficiles, le print semble revenir en force et de nombreux indicateurs reviennent au vert. Le plus grand représentant du commerce en ligne, Amazon, ouvre un magasin physique et de nombreuses autres entreprises du e-commerce découvrent que les catalogues papier boostent leurs ventes en ligne. Ajoutons que les ventes d’e-book ont significativement chuté, que celles des livres imprimés repartent à la hausse et qu’on ne compte plus les magazines tout numériques qui s’essaient à sortir en papier. Avec le numérique, tous les métiers sont transformés, et celui de l’impression n’échappe pas à la règle. L’occasion donc de continuer à explorer les liens entre technologie et innovation, dans un domaine qui réserve bien des surprises.
Quels sont les chiffres-clés de l’impression ?
Globalement, le marché affiche une croissance annuelle d’environ 2 % à 3 %. Le marché de l’impression papier représente environ 6 milliards d’euros. L’impression d’emballages et d’étiquettes en représente 35 %. Le marché de l’impression plastique réalise encore davantage (6,5 milliards, dont 36 % pour l’impression d’emballages et d’étiquettes). L’impression presse souffre globalement alors que l’impression numérique 1 est, au contraire, très dynamique.
Le print, un outil qui reste sérieux et gage de qualité
Si le print paraît en déclin, il reste un outil pris au sérieux par la majeure partie d’entre nous. Le support papier, matériel et palpable, accroît la mémorisation et permet des mises en page impossibles sur le web. Un flyer au grammage épais, accompagné d’un vernis sélectif, ou encore avec un effet de surimpression a plus d’impact et est mieux mémorisé qu’une publicité numérique de plus, parmi les milliers qui nous assaillent chaque jour. Le print reste un média très puissant dont il est difficile de se passer si on veut être impactant auprès de sa cible. Mais le print vit de nombreuses transformations liées au développement du numérique.
Le numérique booste l’innovation dans l’impression
Les chiffres du secteur masquent deux situations très contrastées. D’un côté, l’impression traditionnelle d’emballages et d’étiquettes progresse peu car le marché est mature. De l’autre, les machines numériques affichent une progression à deux chiffres, et même de 20 % à 30 % pour les presses à étiquettes numériques. Le e-commerce et la volonté d’avoir de petites séries personnalisées ont boosté l’innovation.
Pour les magazines et les livres
Beaucoup de lecteurs veulent matérialiser leur attachement à ce que représente pour eux un un magazine par un objet imprimé disposé sur leur table basse. Les magazines résistent étonnamment bien à la numérisation possible des supports, en partie parce qu’ils matérialisent la volonté d’appartenir à une communauté, une tribu.
Les magazines, c’est comme une carte d’adhésion que vous recevriez une fois par semaine, ou par mois.Même si on peut voir en ligne le contenu des magazines, beaucoup de gens voudront encore l’objet physique ». Un magazine est maintenant une marque: c’est un podcast, des réseaux sociaux, un article, une page d’accueil, une application. Pourquoi pas aussi des pages imprimées? A voir la résurgence de certains supports papier, il semblerait que l’impression papier et le numérique peuvent coexister.

Un magazine me relie à ma tribu
En ce qui concerne le livre, on assiste là-aussi à un retour de l’impression papier qui était portant selon les spécialistes vouée à disparaître, tuée par les kindle et les ebooks. Certains types d’histoires, certaines fictions semblent mieux fonctionner sur le papier. Il y a 5/7 ans c’était pourtant la panique collective dans le monde de l’édition. Au début les lecteurs ont migré en masse vers de nouveaux appareils numériques et les ventes de livres électroniques ont grimpé en flèche, en hausse de 1 260% entre 2008 et 2010. Les librairies ont eu du mal à survivre et tout le monde a alors pensé que l’édition allait vivre ce qu’a vécu peu avant le secteur de la musique. Mais l’apocalypse numérique n’est jamais arrivée, ou du moins pas encore. Les ventes de livres numériques ont diminué assez brusquement en 2015 aux États-Unis. Beaucoup de lecteurs sont devenus des lecteurs hybrides et alternent le papier et le support numérique, selon ce qu’ils lisent et les circonstances de lecture. Aux États-Unis, les livres numériques représentent 20 % du marché, un chiffre relativement stable depuis plusieurs années. Selon certaines enquêtes, les jeunes lecteurs (les « digital natives ») préfèrent toujours lire sur papier (enfin, ceux qui lisent encore des livres).
L’innovation numérique est florissante dans le domaine du livre imprimé. En Hauts-de-France, certaines entreprises comme Jouve, acteur pionnier dans l’impression de livres et le numérique, permettent d’imprimer vos livres « à la demande ».
Le web to print
La résistance du support papier s’accompagne cependant d’une numérisation croissante de la chaîne de production et la croissance de ce qu’on appelle le « web to print » se poursuit. Le web to print (ou web2print) est un terme générique désignant l’ensemble des applications web permettant de créer un lien entre les imprimeurs et les acheteurs de documents imprimés. Les solutions web to print se destinent essentiellement à fluidifier et optimiser la communication entre l’imprimeur et ses clients. Le web to print permet de commander voire de personnaliser directement en ligne ses documents imprimés. Les solutions de web to print sont en forte croissance. Le chiffre d’affaires pour l’impression à la demande est passé de 17 milliards d’euros en 2014 à 30 milliards d’euros en 2016 aux États-Unis.
Les usages sont déjà nombreux et paraissent illimités. Des entreprises comme Helloprint France par exemple ont réussi leur virage numérique et permettent à leurs clients d’imprimer sur de multiples supports (affiches, flyers, textiles, plastiques, …). Ces entreprises ont intégré les standards numériques en termes de réactivité, de délai de livraison et de services client.
Le développement des applications web to print est intimement lié à l’essor de l’impression numérique, qui permet de démultiplier les services possibles : impression à la demande même pour de petites quantités, impression à données variables y compris en exploitant de très grandes bases de données (big data), économies d’échelle, impressions au plus juste, diminution des stocks …
L’impression face au numérique. Quel avenir ?
On l’a vu, l’imprimé traditionnel distribué massivement est en perte de vitesse pour des questions de coût, de pollution et d’efficacité. Par contre tous les supports qualitatifs et personnalisés par de la donnée variable ont le vent en poupe. Print et big data font bon ménage. Par exemple, les courriers personnalisés, associés à du couponing adapté au comportement de l’utilisateur, continuent leur croissance.
De même, le cross media (c’est-à-dire le fait de mélanger différents supports de communication pour une même campagne publicitaire) permet d’augmenter la mémorisation d’une campagne, grâce à de nombreuses occasions d’être vu et par un ciblage intelligent via le choix de différents canaux.
A l’avenir, de nombreuses innovations sont annoncées. On verra par exemple arriver le « web to pack » après le web to print, qui permettra de concevoir, commander et se faire livrer les emballages de façon souple et rapide. Une révolution pour un secteur encore épargnée par la révolution numérique.
Les innovations arrivent également sur les machines d’impression elles-mêmes. Celles-ci deviennent de plus en plus intelligentes : elles adaptent l’impression à l’état du support, même s’il comporte des erreurs de placement ou des imperfections. L’impression n’est pas morte et certains annonceurs vont très loin, comme Fanta qui a proposé du print comestible.
Imprimeurs, n’ayez pas peur ! Embrassez la révolution numérique et de beaux jours s’offrent à vous.
Notes :
- Une presse numérique est une machine qui imprime une image numérique directement sur une série de médias. Ce terme est habituellement utilisé dans le contexte de l’impression professionnelle, où de faibles volumes issus de logiciels de mise en page et autres sources numériques sont imprimés à l’aide d’imprimantes laser ou jet d’encre grand format et/ou grand volume.
Bien que plus onéreuse par page que l’impression offset traditionnelle, une presse numérique vous permet d’économiser de l’argent en évitant les phases techniques liées à la réalisation des plaques d’impression. Les presses numériques facilitent par ailleurs l’impression à la demande, les délais d’exécution rapides, ainsi que les modifications d’images à chaque impression.
L’économie totale, ainsi que la capacité et la sophistication croissantes des presses numériques, signifient que l’impression avec ce type d’équipement devrait atteindre, voire dépasser, l’aptitude de la technologie offset à produire des impressions plus conséquentes à faible prix. ↩