Recruter un responsable innovation

Recruter un responsable innovation

Recruter un responsable innovation est compliqué : quelles compétences valoriser ? Comment les mesurer ? Avec quoi les valider ? Un responsable innovation nécessite de combiner des compétences techniques, une vision stratégique et de l’adaptabilité. Ces qualités contribueront à la réussite de votre entreprise dans un monde en constante évolution. J’ai résumé sur le document ci-dessous les compétences, classées par thèmes, qui me paraissaient indispensables à tout responsable innovation aujourd’hui.

Stratégie et hauteur de vue

Même si ce n’est pas très original, il me parait indispensable d’insister sur la capacité du (de la) futur(e) responsable innovation à comprendre et à prendre en compte la stratégie de l’entreprise afin de contribuer à traduire la vision des dirigeants en objectifs opérationnels et, plus globalement, à animer les équipes.

  • Vision : capacité à faire partager et comprendre une vision claire de la stratégie globale de l’entreprise. Au besoin, être en capacité de rendre lisible ce qui ne l’est pas toujours …
  • Influence : capacité à prendre en compte et à influencer les « politiques internes ». Passer beaucoup de temps pour convaincre, déminer, influencer, … Prendre en compte les rapports de force au sein de l’entreprise et de son réseau de partenaires.

Comment valider ces compétences ? A part être en mesure de revenir sur des expériences passées, il est difficile de s’assurer que le candidat possède bien cette vision et cette capacité d’influence. Ces expériences devront forcément être étayées par des éléments concrets : documents, recommandations autres que de complaisance, …

Il est possible également de proposer au candidat une petite mise en situation : on lui décrit une situation relativement complexe (en tous les cas sans solution simple ou mieux, sans solution idéale) et on lui demande comment il réagirait et pourquoi.

Compétences techniques et expérience

Nous sommes ici face à une problématique plus classique : les compétences techniques de gestion de projets, l’expérience afférente et la connaissance d’un ou de plusieurs secteurs économiques. Pour une fois, les diplômes sont utiles pour valider le niveau d’expertise du candidat, mais attention : au-delà de 5 ans d’expériences, intéressez-vous uniquement à ce que le candidat a fait de son temps. Son diplôme n’a alors franchement plus beaucoup intérêt.

  • Management de projet : compétences de chef de projets afin d’être capable de suivre et de superviser un portefeuille de projets. Il s’agit ici surtout de savoir si le(la) candidat(e) ne se limite pas à des connaissances théoriques sur la gestion de projet.
  • Connaissance de plusieurs secteurs économiques : un parcours varié permet de confronter les points de vue, les stéréotypes et les données de base de plusieurs secteurs, ce qui est source d’innovation.

État d’esprit et caractère

Alors ici, forcément terrain glissant. Ceux qui ont l’habitude de recruter le savent : il est extrêmement difficile de cerner le caractère ou l’état d’esprit d’un candidat, notamment si on se contente de lui faire passer un ou plusieurs entretiens. Il est bien évident qu’un candidat répondra « aucun » à la question : « souffrez-vous de préjugés dans les situations que vous ne connaissez pas ou face aux gens ne sont pas comme ceux que vous avez l’habitude de fréquenter ».

Quand on est responsable innovation, les « échecs », les retards, ça fait partie du job

De la même façon qu’aucun ne vous avouera être mesquin, égocentrique ou radin, même si c’est vrai et qu’il aura ensuite avec beaucoup de mal réussi à donner le change, au moins jusqu’à la fin de la période d’essai. Voici pour moi cependant les qualités de caractère d’un responsable innovation :

  • Absence de préjugés : aucune situation n’est la même que précédemment. Ce qui donne l’impression d’avoir été tenté vainement par le passé peut donc aboutir à un grand succès. Les phrases comme « ça ne marchera pas » ou « on a déjà essayé » sont rédhibitoires.
  • Capacité à foncer : face aux lenteurs, aux pesanteurs, aux résistances, le responsable innovation prend des raccourcis et, parfois, profite des non-dits et des non-interdictions pour aller un peu plus loin que le raisonnable. Il faut aller vite, il vaut mieux faire, même si c’est imparfait, que se contenter de penser à quelque chose de parfait.
  • Curiosité : les bons responsables innovation s’intéressent à de nombreux sujets, au risques de passer pour dilettantes parfois. Ils lisent beaucoup, sur des sujets variés, font montre d’un intérêt profond et sincère pour de nouveaux domaines, de nouvelles technologies, de nouveaux secteurs, …
  • Optimisme : quand on est responsable innovation, les « échecs », les retards, ça fait partie du job. Pour le responsable innovation, ces obstacles ne sont rien d’autre que des occasions d’impulser le changement et d’y arriver d’une autre façon.

Pour valider ces compétences, il faut faut tout d’abord accepter que sur ce point précis, vous allez peut-être vous planter et vous « faire embobiner ». Faites tout de même parler le candidat de ses hobbies, de ses meilleures expériences. Emmenez-le aussi loin qu’il l’accepte sur des terrains plus personnels de sa vie (pas sa vie privée, juste ce qui le motive dans sa vie). En général, cela apporte beaucoup d’informations sur le degré d’ouverture ou de curiosité du candidat.

Lors d’un entretien récent, un candidat avait indiqué « lecture » dans ses passions / hobbies. Je lui ai donc demandé quel était le livre qu’il lisait actuellement. Pas de réponse. Le dernier qu’il avait lu ? Pas de réponse. Son auteur préféré ? Une réponse inarticulée que je n’ai jamais réussi à déchiffrer. Demandez au candidat de vous parler de ses aspirations, de ce qu’il souhaiterait faire de l’opportunité que vous lui offrez. Ne laissez pas de côté les hobbies, passe-temps et passions indiqués par le candidat lui-même. S’il vous a affirmé sa ferveur pour le « cinéma » et les « voyages », creusez, faites-le parler.

Management

bon ok pour cette fois, on ne va pas prendre de sanction parce qu’on valorise l’échec. Mais attention la prochaine fois. Ça nous a quand même coûté cher ces conn…

votre directeur

Être un bon manager est difficile. La position est inconfortable et, quoi qu’on fasse, quels que soient les efforts qu’on y déploie, on a souvent l’impression de « faire forcément mal ». Il est difficile de contenter sa direction et de plaire à ses équipes, d’être à la fois exigeant et inspirant, compréhensif et rigoureux. Au-delà de cette difficulté qui est la même pour tous les managers, le responsable innovation présente plus fortement que d’autres certaines qualités : il instille dans toute l’organisation une attitude positive face aux « échecs » et impulse une volonté de changement, très largement au-delà de son équipe :

  • Gestion des échecs et des attentes : le responsable innovation dédramatise l’échec et en fait une opportunité pour réussir et se perfectionner. Au-delà de ce beau principe déjà éculé, il s’agit de quelque chose de très difficile à faire. Une fois que le responsable innovation aura rassuré les collaborateurs et les aura remotivés après un échec, son plus gros travail sera de faire en sorte que sa direction arrête de se lamenter sur les œufs cassés et n’adopte pas l’attitude habituelle « bon ok pour cette fois, on ne va pas prendre de sanction parce qu’on valorise l’échec. Mais attention tout de même la prochaine fois. Ça nous a quand même coûté cher ces conn… ». L’avenir est incertain et réussir impose d’emprunter des chemins inconnus. Le responsable innovation le fait comprendre aux collaborateurs de l’entreprise : les échecs sont inévitables, nous allons essayer d’éviter les plus douloureux et, quand malgré tout nous tomberons sur un os, nous en tirerons les leçons qu’il faut.
  • Volonté de changement : le responsable innovation n’est pas dans l’exploitation mais dans l’anticipation. Il a la volonté d’impulser le changement dans l’entreprise, de faire évoluer son offre et il possède assez de leadership pour entraîner les collaborateurs derrière lui. Il est une source d’inspiration, donne envie aux collègues de tester de nouvelles choses, d’exprimer de nouvelles idées.

Comment identifier chez un candidat ces qualités si particulières ? Ici aussi, foin des diplômes et des discours convenus que le candidat pourra vous proposer dans le cadre d’un entretien. Il vous faut des éléments tangibles, des expériences suffisamment décrites pour qu’elles soient réelles, des témoignages d’anciens collaborateurs ou responsables. J’insiste sur la notion de témoignage : il s’agit d’aller au-delà d’une simple recommandation qui ne prouvera que l’étendue du réseau professionnel du candidat.

Recruter un responsable innovation : une gageure ?

Recruter un responsable innovation peut donc ressembler au treizième des travaux du fils d’Alcmène : comment trouver sans compter sur la providence une personne qui réponde à toutes ces qualités ? Il n’y a pas de recette miracle mais certains réflexes peuvent être utiles.

Tout d’abord croisez les points de vue. Pour ma part, je ne recrute jamais un nouveau collaborateur qu’au moins deux autres collègues n’ont pas également reçu en entretien. Puisqu’il va travailler avec le reste de l’entreprise, autant ne pas se contenter de quelqu’un avec qui on « a le feeling ». L’idéal est même de demander son leur avis à ceux de vos collègues qui ne fonctionnent pas comme vous, qui ne mettent pas l’accent sur les mêmes choses, ceux avec qui vous êtes rarement d’accord.

Le responsable innovation n’est pas la bonne conscience achetée (finalement pas si cher) pour pouvoir se dire que l’entreprise innoveComptez également sur la capacité à progresser de votre candidat. S’il est curieux, malin et enthousiaste, quelques lacunes techniques peuvent facilement être excusées. Suivez votre instinct, tout dépend de la mission que vous allez lui confier. Selon la culture de l’entreprise et l’étendue des changements que vous souhaitez impulser, il vous faudra insister plus ou moins sur l’expérience ou la connaissance de votre secteur d’activité.

Demandez au candidat s’il accepte que vous preniez contact avec ses anciens collègues et responsables. Auprès de ces personnes, essayez de glaner des informations précises sur les réalisations du candidat. Ne vous contentez pas de formules creuses mais cherchez à obtenir des descriptions détaillées des difficultés auxquelles il a été confronté et comment il les a surmontées.

N’oubliez pas non que rien ne se fera sans l’implication sans faille de la direction générale de l’entreprise. Le responsable innovation n’est pas une simple caution et encore moins un magicien qui pourra seul rendre toute l’entreprise plus innovante.

Un outil pour vous aider à recruter un responsable innovation

La grille ci-dessous reprend les principales informations de cet article et est téléchargeable au format pdf.

Recruter un responsable innovation : les compétences indispensables
Recruter un responsable innovation : les compétences indispensables

 

Afin de vous aider dans la démarche de repérage d’un bon responsable innovation, j’ai réalisé un petit fichier au format ods (tableur libreoffice / openoffice, utilisable également avec Excel). Indiquez rapidement quelques informations sur le profil poste attendu puis sur celui du candidat et regarder graphiquement si les deux profils sont compatibles. Il ne s’agit bien sur que d’une aide à la décision, n’hésitez pas à recevoir un candidat si vous avez un doute.

Vous pouvez télécharger l’outil ci-dessous. Il vous suffit ensuite de compléter les parties en bleu en répondant sincèrement aux questions (n’oubliez pas : ne croyez aucune affirmation du candidat si elle n’est pas étayée par des éléments concrets, même -et surtout si !- elle est assénée de façon convaincante !).

 

Recruter un responsable innovation : commencer par renseigner l'outil

Type de documentDétails
logo_pdfUn outil d’aide à la décision pour choisir un responsable innovation, au format ods (libreoffice ou openoffice).
Ce document reprend les informations contenues dans l’article « recruter un responsable innovation » des Cahiers de l’Innovation.
Son achat donne le droit d’utiliser sans limite son contenu.

Ressources

  • Sur le management de l’innovation
  • Sur la gestion de projets

 

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